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Une certaine idée de la France

Novembre 2020
 

La France est régulièrement dépeinte dans les pays anglo-saxons, USA en tête et GB jamais très loin derrière, comme un pays liberticide et foncièrement raciste (aujourd'hui nous parlerait-on de racisme “systèmique”), parce qu'elle a toujours fait le choix, malgré un chemin parfois chaotique, de réaffirmer ses valeurs et principes fondamentaux plutôt que d'accepter des compromissions et de céder à tous les chantages de ses adversaires.

La laïcité, en particulier, pose problème, en grande partie pour les USA qui n'ont jamais réussi à comprendre ce concept, sans doute parce que ce pays est historiquement obsédé de religiosité et de "race", et parce qu'il est difficile de penser contre soi et d'essayer de comprendre le monde autrement qu'à partir de son prisme culturel et historique.

Pour eux et leur séides intérieurs, la France serait donc un enfer sur terre pour l'ensemble des “minorités”, par essence “opprimées” puisque minorités: femmes, non-blancs, non-hétéros, croyants. La presse américaine, New York Times et Washington Post en tête, publie à intervalle régulier des articles incendiaires sur une France "systémiquement" raciste, et aujourd'hui anti-musulmane, une France visiblement guère mieux que celle de Vichy à leurs yeux, qu'elle fantasme depuis sa posture de supériorité morale.

Or il est, a minima, cocasse qu'un pays comme les USA, dans lequel un racisme d'état, véritablement systémique donc, a bien existé entre 1877 et 1964 alors même qu'il s'agissait d'un pays libre et démocratique, “plus grande démocratie du monde” nous rabache-t-on depuis des lustres, dans lequel les mariages entre “races” (mot infâme malheureusement utilisé encore aujourd'hui) étaient interdits, dans lequel est né le Ku Klux Klan qui a compté jusqu'à 6 millions de membres dans les années 1920, dans lequel des gens peuvent défiler avec des croix gammées et vociférer des chants haineux sans être inquiétés, dans lequel la plus grosse menace terroriste aujourd'hui est le fait de suprémacistes blancs néo-nazis, dans lequel les Amérindiens croupissent encore dans des réserves-mouroirs où l'espérance de vie est de 55 ans, pays ultra violent dans lequel plusieurs dizaines de milliers de personnes sont blessées et perdent la vie par arme à feu chaque année, un pays dans lequel tout ceci a, et a eu lieu, est en bien mauvaise position de donner des leçons de “tolérance” à la France.
 
La France qui, pour toutes ses fautes, et elle en a commises, a bien mieux traité en 1917 les soldats noirs américains qu'ils ne l'étaient chez eux, la France qui, au moment où les USA voyaient une explosion des adhésions au KKK et des crimes anti-noirs, voyait des députés noirs et arabes siéger à l'Assemblée Nationale, la France qui, aujourd'hui, pendant que des suprémacistes blancs américains tuent des étudiants et des manifestants aux USA avec la quasi bénédiction de leur président, fait simplement le dos rond face à une série ininterrompue d'attaques terroristes sur son sol.

Et que dire de la Grande Bretagne, dont une certaine presse "de gauche" est également peu avare de critiques acerbes à notre endroit, qui a sombré dans la violence xénophobe et raciste à le suite d'un simple vote politique sur le Brexit en juin 2016 ? Plus de 6000 agressions verbales et physiques officiellement enregistrées par la police britannique contre des étrangers et des non-blancs dans les mois qui ont suivi le vote: tags xénophobes jusque dans les toilettes des écoles, ouvriers polonais agressés dans le coma, des gens insultés et menacés parce qu'étrangers, blancs européens et non-blancs confondus.

Et nous, aujourd'hui.
Comment se fait-il qu'un pays prétendument raciste et invivable pour ses minorités, si souvent blessé dans sa chair, ne se rabaisse à aucune vengeance, aucune vendetta, aucunes représailles ?
Nos amis anglo-saxons préfèrent visiblement ne pas se poser cette question, car la réponse risquerait de nuire à leurs fantasmes et les forcer à descendre de leur piédestal.

Après des années d'attentats, des centaines de morts et de blessés, la réaction des français est un désaveu cinglant pour tous ceux qui veulent nous salir et se glorifier au passage, et d'une dignité qui devrait imposer le silence aux donneurs de leçons drapés dans leur supériorité morale auto-proclamée.
 

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