A la source du mouvement en faveur de l'écriture inclusive, il y a bien évidemment l'idéologie (nord-américaine) tribale, identitaire, victimaire, tout-systémique et du ressentiment qui a accouché du néo-féminisme anti-universaliste, et dont chacun a pu être témoin des manifestations. On pourrait considérer l'apparition de cette norme d'écriture comme le rejeton français des exigences "progressistes" sur les questions de genre, sujet d'âpres polémiques et affrontements dans le monde anglophone depuis de nombreuses années.
La langue serait donc pour ces néo-progressistes, comme tout autre champ de la vie, un terrain d'oppression et de domination systémique masculine et blanche. What else?
La langue française étant grammaticalement "genrée" contrairement à l'anglais, et ne disposant pas d'un neutre spécifique séparé du féminin et du masculin contrairement à d'autres langues romanes, il était inévitable qu'elle se retrouve sur le banc des accusés, avec circonstances aggravantes.
Tout part évidemment d'un postulat purement idéologique et erroné, selon lequel la langue française, parce que "genrée" dans son lexique et sa grammaire, serait "sexiste" et marquerait "l'invisibilisation des femmes" par essence et par intention, postulat consacré par une formulation malheureuse mais néanmoins fameuse tirée de quelques vieux (et rares) manuels scolaires, dont abusent les systémistes obsessionnels : "le masculin l'emporte sur le féminin".
Ce serait bien la preuve irréfutable d'un vil complot du patriarcat misogyne androcentré pour évincer le féminin du langage et, par là, renforcer la suprématie du masculin dans le monde réel. Puisque, ne l'oubliez pas, quoi qu'il arrive, pour le néo-progressisme, tout doit être sexisme, domination et oppression patriarcale, partout et tout le temps.
L'écriture inclusive affiche donc la prétention de corriger cette injustice et de sauver la langue française de son supposé sexisme patriarcal ontologique.
Fort heureusement, a côté des sociologues empêtrés dans leurs névroses obsessionnelles, nous avons encore des grammairiens et des linguistes qui nous permettent de démêler le réel du biais idéologique.
Je me retire donc et passe le flambeau à Patrick Charaudeau, dans un petit article plutôt abordable pour les non-initiés, et qui permet de remettre les pendules à l'heure concernant le supposé "sexisme" ontologique du français.
Bonne lecture.
Patrick Charaudeau, "« L’écriture inclusive au défi de la neutralisation
en français » ", revue Le Débat n°199, mars-avril 2018., 2018, consulté
le 22 août 2021 sur le site de Patrick Charaudeau - Livres, articles, publications.
http://www.patrick-charaudeau.com/L-ecriture-inclusive-au-defi-de-la,344.html
A voir également, son dernier livre sur le sujet:
http://www.patrick-charaudeau.com/La-langue-n-est-pas-sexiste-D-une.html
Un ami me faisait remarquer récemment que l’affichage du drapeau français sur un réseau social pourrait « m’attirer des ennuis », par son association immédiate à l’extrême droite, me rendant ainsi infréquentable aux yeux de certains. Remarque intéressante, qui appelle une réflexion sur le jugement qui peut être fait des symboles d’appartenance à une nation ou des idéaux. L’accaparation du drapeau tricolore et d’autres symboles « patriotiques » par l’extrême droite est certes une réalité, mais devrait-on pour autant s’en satisfaire et, plus encore, s’y soumettre en baissant les yeux, abandonnant dans une posture d’auto-censure toute expression de son attachement à son pays ? Parce que « on ne sait jamais, on pourrait croire que… ». Le plus intéressant à observer dans le qualificatif « extrême droite », accolé par défaut à une expression de patriotisme comme l’affichage d’un drapeau, concerne, à mon sens, bien plus celui qui prononc...